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Newsletter 12 – Octobre 2013 – Droit civil

Un espoir pour le maitre d'ouvrage trompé ?

Lorsque l’immeuble est défectueux, le maître de l’ouvrage invoquera la garantie d’achèvement puis la garantie décennale.

Il pourra, en assumant cette fois la charge de la preuve, invoquer aussi la responsabilité contractuelle lorsqu’il n’y a pas atteinte par exemple à la destination de l’immeuble.

La COUR DE CASSATION ouvre une autre voie, très discrète, la responsabilité pour faute dolosive permettant de « sauver » les situations où les désordres naissent après le délai de 10 ans.

L’hypothèse est celle du constructeur contractuellement tenu à l’égard du maître de l’ouvrage de sa faute dolosive lorsque, de propos délibéré, même sans intention de nuire, il viole par dissimulation ou par fraude ses obligations contractuelles.

Dans le cas d’espèce, les Premiers Juges ont à bon droit relevé que les fondations réalisées sont à l’évidence non conformes aux documents contractuels mais également aux règles de l’Art, et ont pu en déduire que la connaissance par le constructeur de l’insuffisance notoire des fondations a un moment où il était encore possible d’y remédier caractérise une dissimulation constitutive d’une faute dolosive.

3ème Chambre Civile COUR DE CASSATION 27 mars 2013 n° 12-13840.

Convention d'indivision et publication

Une règle maintenant ancienne permet à de futurs ex-époux, faute de s’entendre sur le sort d’un immeuble ou de pouvoir le racheter, de le maintenir en indivision.

Cette règle limitée à 5 ans fait exception au principe de l’article 815 du code civil suivant lequel nul n’est tenu de rester dans l’indivision.

La clause d’indivision est astucieuse et dotée de vertus pacificatrices (5 ans au moins sans combat !).

Ces vertus pacificatrices ont convaincu la COUR DE CASSATION de ne pas laisser ce type de clause être attaquée.

Un ex époux ne voulant pas attendre 5 ans avait imaginé de plaider la nullité de la clause au motif qu’elle n’avait pas été publiée aux hypothèques (au service de la publicité foncière pour employer la terminologie de la RGPP).

Pour la COUR, le défaut de publication la rend inopposable au tiers (un créancier pourrait demander le partage) mais ne change rien entre les ex-époux.

1ère Chambre Civile COUR DE CASSATION 10 juillet 2013 n° 12-12115.

La revendication de la qualité d'associés entre époux

Voici une arme rarement mise en œuvre et pourtant redoutable.

Il arrive assez régulièrement qu’un époux marié sous le régime de communauté ait créé ou développé une entreprise dont il est à ce titre l’actionnaire principal.

La société n’est pas cotée en bourse.

Lorsque les parts sociales ont été souscrites au moyen des biens communs ce qui sera souvent le cas, l’époux de l’associé a le droit de revendiquer en application de l’article 1832-2 du code civil la qualité d’associé pour la moitié des parts acquises ou souscrites.

Si la société a de la valeur, cela change tout.

Un arrêt récent précise que cette demande peut être faite tant qu’un jugement de divorce passé en force de chose jugée n’est pas intervenu.

Chambre Commerciale COUR DE CASSATION 14 mai 2013 n° 12-18103

Devoir de mise en garde et information

La nuance entre les deux est subtile et le praticien a le sentiment qu’au-delà d’une obligation d’information, le banquier a une obligation spécifique de mise en garde.

Il arrive pourtant qu’une information détaillée soit considérée comme suffisante pour sinon valoir mise en garde, du moins dispensé.

C’est ce que viennent de juger les Hauts Magistrats en matière de crédit in fine garanti par un contrat d’assurance vie.

Ce type de prêt qui permet de ne payer que des intérêts pendant sa durée permet à l’emprunteur une belle optimisation fiscale en matière d’investissement immobilier.

Banquier et client sont prudents et « couvrent » l’opération par un placement d’assurance vie réalisé à la date même de l’emprunt. L’idée pour le client est de constituer des plus-values par l’épargne placée en assurance vie et de faire payer par le fisc le coût de mise à disposition du capital.

Sauf que la pratique récente a vu apparaître des pertes sur l’épargne placée en assurance vie.

Le client alléché par l’optimisation fiscale se découvre subitement non professionnel, non averti, et explique ne pas avoir été mis en garde sur le fait que l’on ne gagne pas à tous les coups !

La COUR DE CASSATION vient de juger que le devoir de mise en garde avait ses limites et qu’il ne jouait pas si le client avait été complètement informé.

La remise d’une note d’information claire et complète présentant les différents profils de risques a été jugée comme permettant d’éclairer suffisamment le client sur les risques inhérents à l’opération.

Il est probable que la notice d’information aura beaucoup joué dans le cas d’espèce.

Chambre Commerciale COUR DE CASSATION 22 mai 2013 n° 12-17651.

La reconnaissance de dette a ses fragilités.

Historiquement, la reconnaissance de dette était un instrument intouchable. A reconnaissait devoir X à B.

B était fondé à agir contre A sur le fondement de cette reconnaissance.

Personne n’aurait envisagé d’aller à l’encontre d’une telle reconnaissance de dette sauf des hypothèses exceptionnelles relevant du vice du consentement (exemple l’erreur ou la violence) ou des incapacités (incapacités notoires de celui qui reconnaissait).

La statue reconnaissance de dette est tombé de son piédestal lorsqu’il a été soutenu victorieusement qu’elle ne valait pas preuve de la remise des fonds.

Il convenait encore que le créancier démontre avoir effectivement remis les fonds.

La jurisprudence admet même la preuve contraire à savoir le défaut de cause et donc la nullité de la reconnaissance parce que la remise des fonds n’est pas justifiée.

Cette hypothèse est celle de deux concubins où A avait reconnu avoir emprunté à B pour construire sa maison et où A a pu ultérieurement démontrer qu’il avait bien acheté le terrain et réaliser sa construction avec ses deniers.

1ère Chambre Civile COUR DE CASSATION 3 juillet 2013 n° 12-16853.

Les dommage se cumulent vis-à-vis du constructeur immobilier défaillant

En cas de retard, sont calculées des pénalités de retard par application de l’article R.231-14 du code de la construction et de l’habitation.

Mais ce n’est pas tout.

Si d’autres causes de dommages existent, elles seront indemnisées.

C’est le principe de cumul des dommages.

La COUR DE CASSATION l’a jugé pour des intérêts intercalaires payés à la banque (3ème Chambre Civile COUR DE CASSATION 27 février 2013 n° 12-14090).

Qui paie les travaux supplémentaires les accèptent

Les travaux supplémentaires ne sont dûs que s’ils ont été préalablement acceptés.

En l’absence de devis complémentaire signé, le seul salut de l’artisan est… le paiement.

Le paiement, sans contestation ni réserve de la part du maître d’ouvrage, du montant des situations incluant les travaux supplémentaires, diminue de la seule retenue de garantie 5 % vaut acceptation sans équivoque des travaux non inclus dans le forfait de leur coût, après leur achèvement.

3ème Chambre Civile COUR DE CASSATION 29 mai 2013 n° 12-17715.

L'état à la date de la donation

Un classique s’il en est du droit des successions.

Une donation est rapportable à la succession en application de l’article 860 du code civil à la valeur des biens à la date du partage en fonction de l’état à l’époque de la donation.

Exercice schizophrène s’il en est : le quantitatif à la date la plus proche du partage, le qualitatif à la date de la donation ce qui revient à construire une valeur virtuelle en fonction d’un état qui a pu changer.

Si les biens se sont dégradés, ils n’en seront pas moins évalués à la date du partage comme ils étaient à la date de la donation.

C’est assez logique.

Les autres héritiers ne doivent pas pâtir du défaut d’entretien d’un autre héritier donataire.

Pour un terrain et sa constructibilité, la COUR DE CASSATION retient que la constructibilité est plus un élément de valeur que d’état.

En d’autre terme, la COUR prend en compte la situation constructible ou non à la date du partage même et non à la date de la donation (COUR DE CASSATION 1ère Chambre Civile 13 février 2013 n° 11-24138).

La clientèle existe et sa garantie aussi

Les professions libérales sont progressivement « harmonisées » au nom de l’entreprise.

La mutation la plus spectaculaire a été d’admettre la patrimonialisation des clientèles : à l’instar des fonds de commerce, la clientèle existe, la COUR DE CASSATION l’a trouvée et le droit de « présentation de clientèle » donne droit à espèces sonnantes et trébuchantes.

Cette évolution est logique, favorable à la stabilité économique et officialise une pratique ancienne.

L’étape suivante est la validation des garanties de clientèle.

La COUR DE CASSATION admet la validité d’une clause de garantie de clientèle.

Là, les choses deviennent plus complexes.

En quoi le cessionnaire serait responsable de la perte de tel client ?

Est-ce qu’une telle clause ne porte pas atteinte au libre choix du client ?

La COUR DE CASSATION valide pourtant la clause de garantie de clientèle en s’assurant simplement d’une rédaction de la clause ne supprimant pas le libre choix des clients et en excluant la clause en cas de faute lourde du cessionnaire.

Il est cependant permis de penser que la COUR DE CASSATION a plus statué sur un cas d’espèces que sur un principe de Droit tant le sujet semble complexe.

1ème Chambre Civile COUR DE CASSATION 10 avril 2013 n° 12-15168.

Alerte sur la novation

Les juristes adorent la notion de novation, tout en subtilité, permettant de soutenir que des accords ont évolué…

La COUR DE CASSATION est moins sensible à cette évolution des contrats et maintient une barrière ferme : la novation ne se présume pas.

Les parties doivent manifester une volonté sans équivoque pour substituer purement et simplement de nouveaux engagements aux engagements antérieurs.

Chambre Commerciale COUR DE CASSATION 4 juin 2013 n° 12-1302.

La médiation pénale a plus de portée civile que pénale

C’est le paradoxe.

A titre d’alternative à la poursuite, le Procureur peut faire appel à un Délégué qui va exercer une médiation pénale entre auteur et victime.

Il peut ainsi arriver à un accord.

Quelle en est la valeur ?

Aucune sur le plan pénal.

Le Parquet peut classer sans suite comme décider de poursuivre.

La médiation a des effets complets sur le plan civil.

Elle a la valeur d’une transaction et, chacun le sait, la transaction a la valeur d’un jugement.

La fixation de la responsabilité comme des dommages peuvent être définitives.

1ère Chambre Civile COUR DE CASSATION 10 avril 2013 n° 12-13672.

Tout collaborateur n'est pas clerc

Une partie appelée à dresser un acte chez un Notaire n’est pas disponible.

Elle va donner une procuration à un clerc de l’Etude notariale.

Qui est Clerc ? Le collaborateur désigné par le Notaire à cette fin ? Un collaborateur compétent reconnu au sens de la convention collective comme clerc ?

Est bien Clerc le collaborateur expérimenté formé à ce titre.

La signature d’un collaborateur dépourvu de ce statut sera nulle et l’acte authentique avec !

1ère Chambre Civile COUR DE CASSATION 12 juillet 2012 n° 11-22637.